L’ensemble des scénarios « 100% renouvelables » n’inclut pas le nucléaire, bien que cette énergie n’engendre pas d’émissions significatives de gaz à effet de serre. Que devons-nous en penser ? Le débat « nucléaire vs EnR » persiste, mais est-il à côté de la question climatique ? Essayons de répondre à ces questions ! 

L’impératif climatique : sujet central du débat

L’urgence climatique est le sujet central de notre débat, et ce, en réduisant considérablement les émissions de gaz à effet de serre par la décarbonation de notre économie. Elle repose notamment sur une électrification massive des usages. De plus, la décarbonation des systèmes électriques se traduit par une sortie du charbon, du gaz et du pétrole auxquels il faut substituer les énergies renouvelables et/ou le nucléaire, et ce au niveau mondial.

La production mondiale d’électricité est dominée par le charbon (près de 40%) et le gaz fossile (plus de 23%),
et une source massive de CO2 – Le Monde

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Les deux types d’énergie, présentent des avantages et des inconvénients (de ressources, techniques, environnementaux, économiques) qui dépendent des conditions locales. L’une des caractéristiques qui différencient ces deux catégories d’électricité décarbonée est que certaines ENR, surtout l’éolien et le solaire, sont intermittentes, dépendent de la météo et de l’heure de la journée tandis que le nucléaire fait partie des sources pilotables. Cela signifie que l’intermittence des premières doit être compensée sans recourir à des sources carbonées.

Peut-on s’opposer à l’usage du nucléaire pour l’électricité ?

Oui, c’est possible ! Et ce pour différentes raisons. Ainsi, l’unique option de décarbonation sera le recours aux énergies renouvelables.

Tout d’abord, certains pays s’opposent au nucléaire car ils refusent de dépendre de fournisseurs étrangers. En effet, la Suisse, l’Espagne, la Belgique, la Finlande ou même le Royaume-Uni ne dispose pas, ou plus, d’industrie capable de construire des réacteurs nucléaires, ni de les alimenter en combustibles. Ils décident donc d’arrêter le renouvellement des centrales nucléaires pour éviter toute forme de dépendance. Pourtant, la Finlande, le Royaume-Uni et la Hongrie, eux, commandent des réacteurs nucléaires et leurs combustibles à des fournisseurs étrangers.

Ensuite, le refus du nucléaire peut reposer sur l’opinion selon laquelle cette option débouche inéluctablement sur un accident avec dissémination massive de radioactivité. Elle prend source des expériences de Tchernobyl et de Fukushima. L’opinion inverse se fonde elle aussi sur l’expérience des accidents majeurs sans dissémination de radioactivité existent (Three Miles Island, 1979, USA). Ces deux opinions sont respectables. Par exemple, la première opinion affirme que l’Autorité de sûreté nucléaire n’est pas digne de confiance, la seconde le contraire, et que l’ASN arrêtera toute installation jugée dangereuse, même si cela coûte très cher.

Peut-on vraiment choisir entre le nucléaire et les énergies renouvelables ?

Peut-être pas ! Par exemple, il n’est toujours pas démontré que l’on peut alimenter la France de 2050 en électricité décarbonée sans nucléaire. En effet, même si certains militants politiques, opposés à l’énergie nucléaire, affirment que le dernier rapport de RTE sur le sujet apporte cette démonstration, ce n’est pas tout à fait vrai !

Ce rapport liste quatre conditions à réunir pour qu’un très fort pourcentage d’ENRI (le I de Intermittent) ne soit pas incompatible avec la qualité et la quantité d’électricité nécessaire. Ces conditions sont les suivantes : la compensation de la variabilité des ENR, le maintien de la stabilité du réseau, la reconstitution des réserves et des marges d’approvisionnement, une évolution importante du réseau.

Ces quatre conditions n’existent pour l’instant nulle part ensemble pour un pays de la taille de la France. Quant à leur coûts, ils ne sont pas estimés par le rapport, mais seraient, comme déjà vu dans les articles précédents, élevés. Ces coûts doivent effectivement prendre en compte les besoins en stockage, la flexibilité de la demande et le nécessaire développement des réseaux.

Un système 100% ENR pour le cas français sera donc très cher. Ça on l’a bien compris ! Qu’en est-il du nucléaire ? Le coût du nucléaire futur n’est pas fixé. Il peut être peu cher et très compétitif ou bien très cher. Un coût bas du nucléaire futur français dépend de la décision politique de développer massivement la filière. Est-ce vraiment souhaitable, sachant que cette décision, compte tenu de l’investissement réalisé, sera irréversible ? La question est légitime.

Et si choisir était possible ? En effet, d’autres études montrent que les coûts d’un mix électrique principalement ENR et un mix 50% nucléaire sont comparables. En effet, deux articles publiés par Alain Grandjean (Peut-on se passer de nucléaire en France ?, La montée en puissance des énergies renouvelables électriques ne nous mettra pas sur la paille) visaient à comparer le coût et la faisabilité d’un mix électrique principalement ENR à un mix 50% nucléaire. Les conclusions tirées contredisent l’idée selon laquelle le coût des EnR électrique est exorbitant. Selon lui, l’analyse rationnelle conduit à ne pas s’engager tout de suite dans la construction de réacteurs nucléaires supplémentaires pour prendre le temps, au moins 5 ans, d’étudier les différentes options et ce pour plusieurs raisons :

  • la baisse considérable et qui va se poursuivre des coûts de production des EnR,
  • la dérive du coût du nucléaire en construction et l’absence d’autre option crédible et maîtrisée,
  • la capacité accrue des gestionnaires de réseau à faire s’apparier l’offre et la demande d’électricité qui sont toutes les deux variables en disposant de techniques de gestion de la demande, de réseaux adaptés et de moyens variés de stockage (STEP, Batteries, Gaz de synthèse renouvelable).

Ainsi, le débat est rouvert ! A horizon 2035, avec les perspectives actuelles d’évolution de la consommation d’électricité, il est possible de faire face à une part d’électricité renouvelable variable de l’ordre de 50% de la production. A plus long terme, il serait probablement possible de sortir du nucléaire en considérant certaines hypothèses qui restent encore à approfondir. Les études et réflexions à venir porteront sur plusieurs sujets : les possibilités et besoins à terme en matière de stockage et de réseaux, leurs coûts, le rythme du développement des EnR et les potentiels réellement accessibles ainsi que les éventuelles nouvelles technologies nucléaires plus compétitives et sûres que les technologies actuelles.

Quel serait le meilleur mix énergétique décarboné pour l’avenir ? Avec ou sans nucléaire ?

La réponse à cette question, vous l’aurez compris, n’est pas si simple ! Beaucoup d’études devront être réalisées à l’avenir pour se positionner clairement sur la question. C’est aussi une question de confiance dans les technologies nucléaires et dans les progrès possibles en matière d’énergies renouvelables pour palier aux limites existantes aujourd’hui. De plus, une acceptabilité sociale faible concernant le développement de parc éolien ou solaire rendrait impossible la considération d’un mix énergétique sans ou avec peu de nucléaire.

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