Emmanuel Macron lors de la présentation du plan d’investissement « France 2030 », à l’Elysée, le 12 octobre 2021, pendant laquelle il a confirmé la position de la France en matière d’exploration de la « Zone ».

Une récente étude jette la lumière sur les abysses, révélant leur fragilité

La transition énergétique contribuera-t-elle au déclin de la biodiversité marine et de ses services écosystémiques ? C’est ce que laisse présager une récente étude, publiée le 10 décembre 2021 dans la revue Frontiers In Marine Science. Sur les 184 espèces évaluées vivant près des cheminées hydrothermales, près des deux tiers (62 %) seraient menacées par les projets d’exploration et 39 se trouveraient en danger critique d’extinction, selon la classification de l’Union internationale pour la Conservation de la Nature (UICN).

Cette étude se montre particulièrement préoccupante dans la mesure où les projets d’exploration sont souvent présentés, notamment par la France, comme moins destructeurs que l’exploitation et qu’ils peuvent servir d’autres fins, comme la compréhension du vivant, la protection de l’océan et la recherche scientifique, notamment pharmaceutique.

Cheminée hydrothermale. Les fumées foncées contiennent des métaux. Crédits : NOAA/IUCN

Une ruée vers les métaux?

Or, les projets se multiplient, alimentés par l’appétit grandissant des États et entreprises pour les ressources contenues dans le plancher océanique. En effet, ce dernier renferme des nodules polymétalliques, riches en ressources minérales (cobalt, manganèse, nickel, cuivre, etc.) et en métaux rares (lithium notamment). Autant de matières premières dont la consommation est amenée à connaître une croissance exponentielle, tirée entre autres par le secteur du numérique, le développement des énergies renouvelables ou encore le stockage de l’électricité.

Ces nouveaux besoins, mais aussi les projections de hausse des prix et les risques de ruptures d’approvisionnement, expliquent la convoitise des acteurs privés et publics. C’est pourquoi, si l’exploitation des fonds marins n’est pas encore autorisée, l’Autorité internationale des fonds marins (AIFM) avait délivré, à la fin du mois d’octobre 2021, 30 permis d’exploration couvrant plus de 1,3 million de km² et impliquant 22 pays. Les industriels ne font pas mystère que l’exploration ne constitue qu’un préalable à l’extraction minière.

Tempête sous l’océan

Alors que les défenseurs de l’environnement concentraient jusque-là leurs efforts sur la lutte contre l’exploitation des fonds marins, par exemple dans le cadre de la Deep Sea Conservation Coalition, et le risque à la course au moins-disant environnemental, les cartes sont rebattues par cette étude.

Il ne s’agit en effet plus seulement de défendre des utilisations alternatives ou de promouvoir le principe de précaution, guidé en cela par notre ignorance de la biodiversité des fonds marins et de son potentiel. Ainsi, nous faisons désormais face à un dilemme d’un nouvel ordre : même à des fins de connaissance scientifique, faut-il, en l’état actuel des techniques, continuer d’explorer les fonds marins, au risque, tels des archéologues, d’altérer le terrain en même temps que nous le fouillons ?

À tout le moins faudrait-il encadrer plus rigoureusement leur exploration. Pour ce faire, l’AIFM devrait adopter un règlement en la matière, avant de se pencher sur les conditions d’exploitation de la « Zone ».

Sources :

https://www.theguardian.com/environment/2021/dec/09/mining-may-push-hundreds-of-deep-sea-mollusc-species-to-extinction

https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fmars.2021.713022/full

The Economist: « The Deep Ocean is the Final Frontier on Planet Earth » https://www.youtube.com/watch?v=p0G68ORc8uQ

 

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