La comptabilité verte émerge comme un outil potentiellement révolutionnaire dans le secteur agricole, offrant une nouvelle perspective sur la durabilité et les impacts environnementaux des activités agricoles.

 

Une compta écolo aux cadres obscures

La comptabilité environnementale est devenue un élément clé pour évaluer et promouvoir la durabilité. On distingue deux approches principales :

1- Approche par soutenabilité faible

Cette méthode autorise la substitution des services écologiques par des capitaux financiers. Par exemple, le service de pollinisation par les abeilles, est évalué à 153 milliards d’euros par une étude de l’INRA). Toutefois, cette approche est critiquée pour sa vision réductrice, car elle implique que tout service rendu par la nature est remplaçable.

2- Approche par soutenabilité forte :

Préférée par la chaire de comptabilité écologique, cette approche ne se concentre pas uniquement sur le capital financier, mais reconnait la valeur de diverses richesses naturelles, telles que les abeilles, le cycle de l’eau et les forêts. Elle cherche à préserver ces « multiples richesses », considérant les impacts environnementaux comme des problèmes intrinsèques. Cette vision oriente la comptabilité vers l’objectif de « rembourser » la nature en investissant dans des actions écologiques pertinentes au lieu de simplement les chiffrer

« L’argent provisionné ne va pas dans un pot commun mais est bien ciblé sur des actions de réparation écologiques », précise Aurélien Oosterlinck., coordinateur de la chaire comptabilité écologique

Et l’agriculture dans tout ça ?

A ce jour, La comptabilité verte est très peu répandue dans le milieu agricole. Pourtant, le rapport de l’ACCRA (Audit Comptabilité Contrôle : Recherches Appliquées) identifie cinq enjeux majeurs pour justifier l’adoption de la comptabilité verte dans l’agriculture :

  1. La prise en compte des externalités, positives comme négatives. Par exemple la pollution des eaux d’une rivière qui nuit à l’activité des pêcheurs. Ou à l’inverse une externalité positive:  rôle de la viticulture dans la lutte contre les risques d’incendie.
  2. L’amélioration de l’image des agriculteurs par leur responsabilité environnementale.
  3. L’adaptation aux temporalités de l’agriculture. Lors d’une conversion en agriculture bio, il faudra plusieurs années avant que les terres se « dépolluent » et que la ferme devienne rentable.
  4. L’intégration du risque climatique dans les calculs financiers.
  5. La justification des subventions agricoles grâce à la valorisation de pratiques durables.

Les limites du système 

Malgré tout, les chercheurs soulignent les défis de la mise en œuvre de la comptabilité verte, notamment liés à l’évaluation subjective des pratiques, la lourdeur des information à traiter, et l’absence de trésorerie immédiate.

La comptabilité verte présente un grand potentiel pour transformer le système agricole en favorisant la soutenabilité et la transparence. Cependant, le manque de reconnaissance institutionnelle limite son adoption actuelle.

La question demeure : les agriculteurs sont-ils prêts à embrasser cette transition comptable pour affronter la crise environnementale  ?

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