Les matériaux critiques sont indispensables à nos industries de pointe et à la transition énergétique. Leur demande est par conséquent en forte croissance mais leur production et approvisionnement posent problème. Les fonds marins, extrêmement riches en nodules poly métalliques, suscitent les convoitises. Mais pour quel impact environnemental ?
Les matériaux critiques, une ressource indispensable à nos modes de vie actuels, mais aussi à la transition énergétique
Les matériaux critiques, tels que les terres rares, le lithium ou le cobalt, sont essentiels à certaines technologies et industries, tels que les équipements électroniques de pointe, les batteries, mais également les technologies critiques pour la transition énergétique. Par exemple, les aimants des éoliennes récentes utilisent du néodyme, qui possède des propriétés magnétiques beaucoup plus fortes que celles des anciens aimants, ce qui permet de réduire la taille et le poids des génératrices. Également, sans lithium, impossible de fabriquer les batteries alimentant les téléphones portables, voitures électriques, ordinateurs portables. Sans oublier le cuivre, nickel, magnésium, indispensables à nos technologies de pointe.
De la dépendance aux hydrocarbures aux matériaux critiques
L’accélération de la transition énergétique va nous pousser à abandonner les énergies fossiles pour nous tourner vers une électrification tous azimuts qui aura pour conséquence une dépendance forte à ces matières premières. L’Agence Internationale de l’Énergie estime que la demande en lithium va être multipliée par 40 d’ici 2050. Pour la Banque mondiale, la production de graphite, lithium et cobalt devrait augmenter de près de 500 % d’ici à 2050.
Or si ces matériaux sont considérés comme critiques, c’est parce qu’ils sont soit rares, soit difficiles à extraire et produire. De plus, certains pays ont actuellement le monopole de production de certains de ces matières premières, la Chine étant le producteur principal des terres rares. Cela s’explique par une main-d’œuvre moins chère, des gisements plus importants et des lois environnementales plus souples, la production des terres rares étant particulièrement polluantes.
La relance de l’exploitation en Europe
L’Union européenne vise à satisfaire 25% de la production mondiale de batteries en 2030, contre 2% aujourd’hui. Si l’Europe souhaite assurer sa souveraineté et réduire sa dépendance à l’égard de la Chine, elle va devoir non seulement soutenir une industrie de recyclage performante, mais également développer ses propres sources minières. Les pays européens cherchent donc à relancer l’exploitation de mines sur leurs sols. Les pays doivent identifier les ressources sur leurs territoires, actuellement mal connues, et s’assurer que la qualité des minéraux extraits répond aux exigences des industries, ce qui est actuellement rarement le cas en Europe.
L’acceptation de tels projets par les populations locales pose également problème et est aujourd’hui le principal frein au démarrage des projets miniers. Les mines ont en effet un impact important et à long terme sur l’environnement, suscitant le rejet des habitants des territoires concernés.
L’exploitation des océans
La solution pour ces pays pourrait venir de l’exploitation des océans, riche en nodules poly-métalliques, présents directement sur leurs fonds. D’après l’autorité internationale des fonds marins (AIFM), une zone de 4,5 millions de kilomètres carrés, connue sous le nom de faille de Clarion-Clipperton, compterait jusqu’à 34 milliards de tonnes de nodules. Et en leur sein, 340 millions de tonnes de nickel et 275 millions de tonnes de cuivre.
En comparaison, les ressources mondiales de nickel sur la terre ferme sont évaluées à 300 millions de tonnes et celles de cuivre, à 800 millions de tonnes. Les nodules riches en métaux rares ont également été repérés au milieu de l’Atlantique, le long de la dorsale montagneuse qui s’étire du pôle Sud à l’Islande.
Cet eldorado suscite de fortes convoitises
La société canadienne The Metals Company (TMC) est convaincue de ce potentiel et a commencé à explorer, prospecter et étudier les meilleurs moyens d’exploiter ces ressources. Elle a également obtenu un permis de l’AIFM pour explorer un territoire sous-marin de 75 000 kilomètres carrés de superficie.
Pour quel impact ? Craintes sur la biodiversité et pollution générée
Les fonds marins sont très riches en biodiversité. L’exploitation des nodules pourrait avoir des effets écologiques considérables, en générant ”des panaches de sédiments et du bruit au fond de la mer”, mais également une destruction des fonds par l’effet de labourage du à la charrue utilisée dans la récolte des nodules. Un certain nombre de pays, dont la France, l’Allemagne ou l’Espagne, se sont aujourd’hui prononcés pour une interdiction de l’exploitation des fonds marins.
Certains constructeurs automobiles et d’électroniques se sont également engagés à ne pas utiliser les ressources métalliques provenant des océans. Mais combien de temps ces positions tiendront-elles, face à l’immense besoin en matériaux générés par nos nouveaux usages et au potentiel considérable mis en avant par les sociétés minières ?
Quelles seront les conséquences sur la biodiversité de cette nouvelle course à l’exploitation minière, sur un environnement actuellement inexploité ?
CNRS: Les terres rares : le paradoxe environnemental | INSU
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