Il est difficile aujourd’hui d’ouvrir son journal ou d’allumer la télé sans tomber, au moins une fois par jour, sur un article ou une émission traitant du sujet climatique et des impacts sur la vie sociale et économique. Entre documentaires engagés et chroniqueurs climatosceptiques en passant par les émissions thématiques, le paysage médiatique n’a jamais autant traité du changement climatique. Est-ce pour autant suffisant ou efficace pour accompagner la population dans la réflexion et l’appréhension du sujet?
Un format peu efficace
Jean Marc Jancovici affirme souvent dans ses conférences ou ses interventions médiatiques que le problème du sujet écologique est sa complexité. Celle-ci est peu adaptée aux différentes modalités médiatiques proposées aujourd’hui. D’abord sur la forme: la tendance consumériste qui touche même notre rapport aux médias impose souvent des formats courts, des interventions chronométrés ou des interviews express où il ne faut surtout pas perdre l’auditeur ou le spectateur. Sur les plateaux de télé, tout est orchestré pour que les interventions prennent la forme de « débats », ou des chroniqueurs ou des « experts » vont s’échanger des invectives, se couper la parole ou se « clasher ». La mode est à celui qui fait le plus de buzz, avec une surenchère constante des phrases choc, qui alimenteront à leur tour les unes des journaux et des JT. C’est à croire si les médias ne profitent pas de la ferveur autour du sujet écologique pour augmenter leurs audiences et enchaîner les spots publicitaires.
Lost in translation
Quand bien même la forme aurait plus de rigueur et de sérieux, la complexité du sujet écologique demeure un vrai sujet. Comment expliquer, avec des mots simples et compréhensibles, des courbes, des chiffres et des statistiques que tout le monde s’accorde sur leur illisibilité? Comment sortir du langage « ingénieur » ou scientifique et arriver à structurer une pensée pédagogique et claire? Et enfin, comment vulgariser sans tomber dans la caricature et déposséder le sujet de sa substance?
Par ailleurs, on peut s’interroger parfois sur la légitimité de certains profils d »experts » invités à prendre la parole sur les sujets écologiques quand on sait leur manque de rigueur scientifique ou l’ambiguïté de leur position politique sur tel ou tel autre sujet. Certains journalistes poussent la provocation jusqu’à infirmer ouvertement les conclusions de recherches scientifiques sérieuses dans le seul but de discréditer les militants et semer le doute dans l’opinion publique.
Quel rôle peuvent jouer les médias?
Nous savons que la transition écologique va nécessiter des efforts d’adaptation et de changement à la population. Mais les gens auront besoin de sens pour pouvoir opérer ces changements sans frustration ni colère. On peut dès lors se demander si c’est bien le rôle des médias de les accompagner dans cette démarche. Un média doit-il expliquer les faits, présenter les chiffres et exposer la réalité, avec les travers décrits plus hauts? ou bien doit-il traduire aussi les récits désirables et souhaitables qui poussent l’imaginaire collectif vers une orientation bien définie?
Plus que jamais, la responsabilité d’informer et de former
Une charte a même été créée par un collectif de journalistes afin de structurer leur mission autour de la question écologique. La charte met l’accent sur les notions de transparence, de rigueur et d’information impartiale et juste. Sans basculer dans l’engagement, les médias sont invités aujourd’hui à être à la « hauteur » de la gravité de la situation et d’apporter à la population l’éclairage nécessaire pour bien comprendre les enjeux.
C’est en tout cas ce qu’affirme Clément Fournier, rédacteur en chef de Youmatter, dans son édito sur le sujet du traitement médiatique de l’écologie: « La transition écologique et sociale est certainement l’enjeu le plus complexe que vont devoir affronter nos sociétés dans les décennies à venir, et elle implique des transformations économiques, sociales et culturelles massives. Les médias doivent jouer un rôle dans ces transformations : informer, analyser, décrypter, ouvrir le débat, faciliter le dialogue. Peut-être plus encore que d’autres, les médias ont aujourd’hui la responsabilité d’être à la hauteur de cet enjeu. »
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