La multiplication des aléas climatiques pousse les assurances à se détourner du marché des collectivités, devenu peu rentable. Les pratiques sont appelées à évoluer pour mieux prévenir et gérer les risques.

Deux mois après des crues historiques, le Pas-de-Calais est à nouveau touché par des inondations en ce début d’année. Après le temps des secours, viendra celui des réparations et des discussions avec les assureurs. Du côté des communes comme de celui des compagnies assurances, les aléas climatiques suscitent des inquiétudes grandissantes.

 

Beaucoup de communes déjà concernées par le désengagement des assurances

Depuis le 1er janvier 2024, la ville et l’agglomération des Sables-d’Olonne ne sont plus assurées pour les « dommages aux biens et les risques annexes » comme les tempêtes ou les inondations. Dès lors, ces collectivités devront assumer seules la réparation des dégâts en cas de nouvelles intempéries, en espérant que cette situation d’auto-assurance forcée ne soit que temporaire.

Le cas des Sables d’Olonne est loin d’être un cas isolé. Selon des estimations révélées par Alain Chrétien, membre du bureau de l’Association des maires de France (AMF), il y aurait entre « 1 000 et 2 000″ communes en France qui ont vu leur contrat résilier ou leurs cotisations exploser au 1er janvier dans le cadre des renouvellements de contrats ».

De leur côté, les assureurs, qui se mettent en retrait ou augmentent leurs primes, insistent sur le déséquilibre financier du système, notamment en raison du dérèglement climatique. Ainsi, comme le souligne François Schmitt, Président de Groupama : « On observe un triplement du coût des sinistres climatiques sur la période 2018-2022 en comparaison à la période 2013-2017 ».

Face aux réactions des acteurs de l’assurance, l’inquiétude des collectivités augmente en même temps que celle de la sinistralité liée au changement climatique. Tous les territoires français seront-ils assurables à l’avenir ?

 

« un monde à +2°C pourrait encore être assurable, mais un monde à +4°C ne le serait certainement plus».

Henri de Castries, président d’Axa, 2015

 

Vers des territoires inassurables ?

La question de l’assurabilité est déjà d’actualité dans plusieurs régions du monde. Ainsi, dès 2019, certaines compagnies refusaient de couvrir les habitants de la Floride contre les inondations ou les Californiens contre les feux de forêt. Selon un rapport de la First Street Foundation, plus de 39 millions de propriétés américaines pourraient être privées d’assurance si les primes d’assurance reflétaient les réalités climatiques.

En France, une étude menée par la Caisse Centrale de Réassurance en partenariat avec Météo France, la sinistralité au titre des périls couverts par le régime des catastrophes naturelles devrait augmenter d’environ + 40 % à horizon 2050 sous l’effet du changement climatique. Ces chiffres mettent en lumière les besoins d’adaptation et de prévention dans les territoires.

 

Une nécessaire adaptation des pratiques

En réponse à l’alerte conjointe des maires et des assureurs spécialisés en France, le Ministère de l’Economie et celui des Collectivités territoriales ont annoncé en octobre dernier le lancement d’une mission sur l’assurabilité des collectivités. Parmi les pistes figure la nécessité d’une démarche plus proactive des collectivités. Le transfert intégral des risques aux assureurs n’étant plus possible, les collectivités devront apprendre à mieux piloter leurs risques et mettre en œuvre des actions de prévention. L’auto assurance partielle par les collectivités pour les risques mineurs pourrait également se généraliser. Quant à l’Etat, il pourrait être davantage mis à contribution pour couvrir certains aléas.

 

Face à la hausse de la sinistralité climatique et des coûts associés, le fonctionnement classique du marché des assurances montre ses limites. L’Etat, les collectivités et les assureurs sont invités à repenser leurs modes de fonctionnement. Parviendront-ils à trouver le bon équilibre des risques et mieux partager leur prise en charge ? Premières réponses au printemps avec les conclusions de la mission interministérielle.

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